Le Casseur d’os – volume 12

Couverture du Casseur d'Os volume 12

Notes d’Ornithologie Pyrénéenne n° XVII Novembre 2010 à octobre 2011

J.L. Grangé, F. Ballereau, F. Cazaban, S. Duchateau, J.-J. Hourcq, S. Pérès, P. Urbina-Tobias

La période considérée dans ces dix-septièmes NOP a été riche en observations de diverses sortes :

. Concernant la reproduction, de nouveau, nidification confirmée de divers anatidés : Canards souchet Anas clypeata et chipeau Anas strepera, Sarcelle d’hiver Anas crecca, Fuligule milouin Aythya ferina, ainsi que d’autres espèces, telles la Spatule blanche Platalea leucorodia qui semble s’installer durablement, l’Échasse blanche Himantopus himantopus et le Petit-duc scops Otus scops (première donnée pour le Bassin de l’Adour). La Chouette de Tengmalm Aegolius funereus a, elle aussi, profité de l’abondance des petits rongeurs forestiers, suite à une faînée exceptionnelle : 8 sites avec mâles chanteurs ont été suivis en montagne béarnaise.

. Pour ce qui est des hivernants, la faînée abondante a permis la formation de deux dortoirs de Pinsons du Nord Fringilla montifringilla, exceptionnels de par leurs effectifs (1,2 à 1,7 millions et 4 millions d’individus). La rigueur de l’hiver a amené un nombre important d’anatidés habituellement rares dans notre région : Cygnes de Bewick Cygnus columbianus et sauvage Cygnus cygnus, Oie à bec court Anser brachyrhynchus, Harelde boréale Clangula hyemalis, Harle bièvre Mergus merganser (au moins 30 individus), Harle piette Mergus albellus et Garrot à oeil d’or Bucephala clangula.

. L’abondance inhabituelle d’Anchois près des côtes en été-automne a permis l’observation en nombre remarquable d’espèces pélagiques : Puffins des Baléares Puffinus mauretanicus, majeur Puffinus gravis et fuligineux Puffinus griseus, Pingouin torda Alca torda. Autre fait marquant, deux espèces nouvelles pour le Bassin de l’Adour ont été observées : la Sterne bridée Sterna anaethetus à Vieux-Boucau-les-Bains le 9/11/2010 et le Bécasseau de Bonaparte Calidris fuscicollis à Momas (lac de l’Ayguelongue) du 13 au 21/09/2011. Parmi les espèces occasionnelles, en sus des anatidés citées plus haut, il faut noter les nouvelles mentions du Vautour moine Aegypius monachus (7 individus), de la Buse pattue Buteo lagopus, de l’Outarde barbue Otis tarda, du Mergule nain Alle alle (3 individus), de la Glaréole à collier Glareola pratincola (6 individus), du Labbe à longue queue Stercorarius longicaudatus (4 individus), des Goélands à ailes blanches Larus glaucoides et bourgmestre Larus hyperboreus, de la Guifette leucoptère Chlidonias leucopterus, du Coucou geai Clamator glandarius (3 individus), du Rollier Coracias garrulus (6 individus), de l’Alouette haussecol Eremophila alpestris, de l’Hirondelle rousseline Hirundo daurica et du Pouillot à grands sourcils Phylloscopus inornatus (6 individus).

Bilan du baguage des passereaux migrateurs et nicheurs sur les barthes de la Nive (Pyrénées-Atlantiques) en 2011

P. Fontanilles, B. Chanchus, X. Chauby, C. De Franceschi, L. Dufresne, J. M. Fourcade, J.M. Lapios, F. Lartigau, P. Legay, P. Thouy, S. Tillo, P. Urbina-Tobias, R. Short & H. Williams

L’étude des passereaux migrateurs sur les barthes de la Nive, menée par l’Observatoire d’Intérêt Scientifique Ornithologique (OISO), s’est poursuivie en 2011 avec la réalisation du quatrième camp de baguage automnal sur une large période, du 18 juillet au 31 octobre 2011. Le suivi s’est déroulé de façon quotidienne et avec l’usage de la repasse.

De mai à mi-juillet, une étude sur la reproduction de la Rousserolle effarvatte Acrocephalus scirpaceus, réalisée toutes les deux semaines, sans repasse, a également eu lieu.

La technique utilisée, le site, le contexte de l’étude et la méthode employée durant le camp automnal ont été présentés par FONTANILLES (2009). Le protocole standard du thème national de recherche ACROLA a été suivi du 18/07 au 30/09, à l’identique depuis 2008 sur la roselière principale de Villefranque. Plusieurs autres sites ont été testés : les roselières de fossés d’Ansot (du 06/08 au 09/08) et les barthes de l’Urdains (du 16/08 au 28/08) sur Bayonne, ainsi que des prairies et saulaies de Villefranque.

Au total, 9487 captures ont été réalisées, pour 62 espèces différentes. Le tableau en annexe présente le bilan par espèces et par mois, ainsi que les dates de première et dernière captures. Rousserolle effarvatte et Phragmite des joncs Acrocephalus schoenobaenus dominent les captures en juillet, et en août se rajoute la Fauvette des jardins Sylvia borin. La Fauvette à tête noire S. atricapilla passe en nombre important en septembre et octobre. Ce mois, suivi pour la première fois en intégralité, a montré un flux important de Pouillot véloce Phylloscopus collybita. Nous avons eu deux espèces originales, un Léiothrix jaune Leiothrix lutea le 15/10 et un Pouillot à grands sourcils P. inornatus le 26/10.

Au printemps, huit Phragmites des joncs migrateurs ont été capturés en mai, et encore un le 19/06 alors que l’espèce ne niche pas sur le site. La Rousserolle effarvatte migre en nombre important en mai alors que les individus locaux commencent leur reproduction. La structure démographique de ces nicheurs a pu être définie. L’envol des jeunes a eu lieu de la seconde semaine de juin à la mi-juillet.

Bilan de baguage de la halte migratoire postnuptiale sur le marais de Moïsan en 2011

S. Tillo

Au total, 1580 oiseaux appartenant à 39 espèces différentes ont été capturés. Ces captures se répartissent en 1469 baguages et 111 contrôles (recaptures d’individus déjà bagués). Parmi ces derniers, 103 avaient été bagués sur le site (autocontrôles) et permettent de mesurer par exemple l’évolution de la masse durant le séjour sur le marais. Huit contrôles concernent donc des oiseaux bagués à l’extérieur du site. Ils proviennent de 5 pays différents, y compris la France, et concernent 4 espèces.

L’Aigle royal Aquila chrysaetos sur le versant nord des Pyrénées occidentales. Synthèse de la saison 2011

L. Rieu, L. Gonzalez & S. Hommeau

Depuis 2008 (41 couples), le nombre de couples évolue peu. Malgré une pression d’observation toujours plus importante, seul le nombre de couples soupçonnés d’installation semble augmenter. Il faut donc nous attendre, dans les années à venir, à voir le nombre de couples reproducteurs progresser. L’arrivée des observateurs de NMP devrait aussi logiquement apporter son lot de découvertes sur les basses vallées bigourdanes dans les années à venir. Nous pouvons d’ores et déjà estimer le potentiel reproducteur sur les Pyrénées occidentales à ± 50 couples.

Bilan de la saison 2011 :

.40 couples certains.

.14 couples non suivis ou avec données insuffisantes

.26 couples contrôlés correctement

.5 couples ne se reproduisent pas

.21 pontes déposées

.5 échecs pendant la période d’incubation

.2 échecs pendant l’élevage du jeune au nid

.16 jeunes à l’envol

.Productivité = 0,62 jeune/couple (nombre de jeunes à l’envol /nombre de couples contrôlés)

Les particularités taxonomiques de l ’avifaune nicheuse des Pyrénées françaises : synthèse bibliographique

S. Duchateau

Cette synthèse, basée sur la consultation de diverses publications, locales ou de portée plus vaste, anciennes comme récentes, dispersées et parfois peu connues, recense les différentes sous-espèces d’oiseaux se reproduisant dans les Pyrénées françaises et leur piémont.

Dialectes chez le Grimpereau des bois Certhia familiaris dans les Pyrénées : la frontière d’Iraty

M. Clouet & J. Joachim

Le chant territorial du Grimpereau des bois Certhia familiaris a été enregistré sur 132 individus différents, répartis entre le massif d’Anie à l’est et la Sierra de Aralar à l’ouest. L’introduction du chant varie avec la présence d’une note vibrée dans l’est de la zone d’étude et l’absence de cette note vibrée dans l’ouest. La zone de contact est trouvée dans le massif d’Iraty, qui sépare ainsi deux zones dialectales distinctes. Un isolement temporaire mais suffisamment long de populations a permis que se constituent ces zones dialectales différenciées. Les facteurs qui ont pu contribuer à cet isolement sont discutés : la particularité biogéographique du massif d’Iraty est soulignée, de même que l’impact des déforestations d’origine anthropique, liées au développement du pastoralisme. Le retrait du hêtre dans des stations refuges puis sa reconquête de la chaîne pyrénéenne lors du réchauffement post-glaciaire sont également évoqués pour leurs actions d’isolement puis de rétablissement du contact entre les populations de Grimpereaux des bois.

L’erratisme de l’Élanion blanc Elanus caeruleus en France : historique, tendances, prospective

J.L. Grangé

L’Élanion blanc Elanus caeruleus est passé dans notre pays, en vingt années, d’espèce rarissime (jusqu’en 1983) à rare (présente quasi-uniquement dans l’extrême sud-ouest) puis à régulière en petit nombre sur l’ensemble du territoire (depuis 2004-05 environ). Comme quelques autres espèces aviennes, il a fait preuve d’un fort dynamisme, inhabituel pour un Falconiforme. Sur la base des observations homologuées par le CHN français, nous analysons la progression de ce rapace dans l’espace et le temps, de 1900 à 2009. Sur 91 observations répertoriées, 52 % ont été réalisées entre 2004 et 2009 et sur 57 départements visités, 47 % l’ont été durant cette même période. Les durées de séjour sont soit courtes (74 % de 1 à 5 jours), soit de longue durée (20 % de plus de 30 jours). L’espèce est observée en erratisme à toute époque de l’année actuellement avec, cependant, un pic qui tend à s’estomper de mars à mai (40 % des observations) et un pic secondaire en automne (27 % des observations). Les observations hivernales ne sont plus exceptionnelles (21 % de novembre à février). Nous discutons de l’origine des oiseaux impliqués dans cet erratisme : au vu de la corrélation significative entre le nombre de juvéniles envolés l’année N et le nombre de données d’erratisme les années N et N+1, il ne fait plus de doute que ces individus proviennent de la petite population du sud-ouest de la France (47 couples en 2010). Le statut de l’espèce ailleurs en Europe est présenté sur la base de 55 observations d’individus erratiques.

Durée du séjour et désertion des sites de naissance par les jeunes Faucons hobereaux Falco subbuteo dans les Hautes – Pyrénées

J.M. Fourcade, C. & D. Raguet

La durée du séjour des jeunes Faucons hobereaux Falco subbuteo sur le site de naissance, après l’envol, a été étudiée dans les Hautes-Pyrénées. Le départ des jeunes intervient majoritairement dans la deuxième semaine d’octobre. La durée de leur séjour après l’envol est en moyenne de 50 jours. Les nichées dont l’envol est le plus précoce n’écourtent pas leur période de dépendance et il existe une tendance à partir plus tard chez les nichées envolées tardivement. Ces résultats confortent l’hypothèse de l’attachement des jeunes aux nourrissages des adultes, lesquels durent jusqu’aux jours précédant le départ. Le départ des adultes et en particulier du mâle correspond à la chute des effectifs d’Hirondelles rustiques Hirundo rustica. Les jeunes hobereaux, au régime insectivore, sont probablement indépendants dès leur deuxième semaine de vol mais ne trouvent pas, en période automnale, une ressource alimentaire suffisamment stable et prévisible pour s’émanciper précocement. Les nourrissages par les adultes à base de proies vertébrées leurs permettent de développer une meilleure condition corporelle pour affronter la période de migration et d’éventuelles pénuries temporaires d’insectes liées aux modifications météorologiques caractérisant l’automne en Europe tempérée.

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